chargement...

haut de page
Remontez pour accéder au menu
165 visiteurs :: Invité  » se connecter  » s'enregistrer

King Diamond - The Eye

Chronique

King Diamond The Eye
Les grands-mères démoniaques et autres créatures fantastiques, ça va bien cinq minutes. Kim Bendix Petersen avait envie de raconter autre chose, après son excellent diptyque presque autobiographique sur les terreurs de l'enfance et les tortures de l'âge adulte, « Them » (1988) et Conspiracy (1989). Pour donner du carburant à son imagination débordante, il farfouille dans sa bibliothèque et déniche, à la faveur de ses recherches sur l'Inquisition en France entre le XVe et le XVIIe siècle, plusieurs faits historiques suffisamment barbares pour être dignes d'être contés sur l'album de son groupe homonyme King Diamond, intitulé The Eye et paru en 1990. Outre deux personnages féminins au destin tragique, il fait se réincarner Gabriel Nicolas de la Reynie, lieutenant de police parisien du XVIIe siècle. Désigné maître de la Chambre ardente par le roi Louis XIV, il est chargé d'instruire un procès retentissant pour une sombre affaire d'assassinat par empoisonnement en 1677. Cette « affaire des poisons » qui dégénère en accusation massive est dépeinte dans le morceau ultra épique « The Trial (Chambre Ardente) » et voit l'inspecteur confronter une certaine Jeanne Dibasson, accusée de sorcellerie, avec une cruauté irascible. Dans des paroles qui comptent tout de même leur lot d'éléments fantastiques et horrifiques, comme ce collier intitulé « Eye of The Witch » permettant au mystérieux narrateur d'assister à ces multiples événements sanglants, le parolier voulait capter la paranoïa d'une époque où la France des marges dérapait dans l'obscurantisme.


« Jeanne Dibasson, you stand accused before the burning court for practising witchcraft. Do you confess ? »

En effet, bon nombre de charlatans ne se gênaient pas pour faire leur beurre à grand coup de messes noires sur leurs crédules contemporains. Une partie de l'histoire de The Eye se déroule dans le couvent de Louviers, dirigé coup sur coup par deux aumôniers faisant peu de scrupule des Évangiles, le Père Pierre David, jusqu'en 1628 et le Père Mathurin Picard, qui prend sa suite de 1628 à 1642. Les deux ecclésiastiques pervers se lancent dans des sermons occultes à base de rituels ésotériques et érotiques tirés d'une doctrine qui prétend guérir le péché par le péché. Ils recueillent la jeune nonne Madeleine Bavent, qui se dit possédée par le diable. Le second tente de la violer à l'aide d'un philtre à base de sang, de vin rouge et d'une mystérieuse « poudre blanche » lors d'une séance d'exorcisme malsaine. À la mort du prélat en 1642, la bonne sœur est emprisonnée et finit par trouver la mort comme le révèle l'avant-dernier morceau du disque. En tout cas, l'« affaire des possédées de Louviers » pose le décor d'un album-concept diablement inspiré.


« The nuns freaks out, lust in their eyes...
From now on every Sunday this time
Father Picard's in control of their minds »

D'autant plus que The Eye est piloté par des musiciens talentueux : après l'arrivée sur « Them » (1988) de Hal Patino (basse) et Peter Blakk (guitare), qui a amené avec lui son répertoire de riffs qui tuent, King Diamond intègre un nouvel artificier à son escouade pour pallier à la défection de Mikkey Dee dès l'album précédent : Snowy Shaw, annoncé à la batterie sur le livret du disque. Il s'avère que le blondinet s'est seulement contenté de programmer une boîte à rythme... ce qui n'affecte absolument pas l'atmosphère unique de cet album. Je dois confesser que l'illusion m'a berné durant des années. Le groupe est toujours mené par Andy LaRocque (guitare) et son leader incontesté qui en plus de composer la plupart des morceaux et d'assurer ses parties vocales si particulières, s'occupe ici des claviers aux côtés du producteur Roberto Falcao. Cet instrument, un peu plus présent que d'habitude, ajoute des sonorités encore plus ténébreuses à certains morceaux : l'ouverture « Eye Of The Witch » donne le ton, tout comme l'énormissime « Behind These Walls » et son clavecin obsédant. Les notes virevoltantes d'orgue qui subliment « 1642 Imprisonment » ou les accords qui appuient les « power chords » épiques de « The Curse » font toute la différence.

Cette magie occulte qui sort de ses paroles et de ses riffs mortels consacre ce cinquième full-length comme la meilleure sortie de King Diamond. Non seulement le groupe n'a rien perdu de sa superbe dans les furtifs mid-tempi qui retiennent leurs cavalcades heavy metal pour mieux les déchaîner – pensons aux effluves divines de « The Meetings » qui ralentissent puis relâchent des couplets déchaînés – mais il brille dans sa gestion des refrains, totalement hymnesques. Celui de « Father Picard » est un bon exemple, laissant retentir une ligne de chant totalement possédée, sur laquelle le frontman utilise une voix de tête aussi irréelle qu'intriguante, incarnant à la perfection la perversité du personnage auquel le morceau est dédié :

« I'm Father Picard, I'm taking over
Things will be different here!
You are the four God has chosen...
To be his angels in white
Drink my sweet holy wine! »

L'instabilité maîtrisée de sa tessiture hante les recoins de cet opus avec une intensité exemplaire. Alors qu'il utilise des vocalises graves et sévères pour incarner l'inspecteur de la Reynie (« The Trial (Chambre Ardente) »), il évoque la sorcellerie dont se rendent coupable ses personnages avec ses borborygmes terrifiants dans l'ouverture « Eye Of The Witch », qui déboîte le palpitant d'entrée avec les « palm mutes » démentiels des deux guitaristes et les harmoniques sublimes d'Andy LaRocque. Ce morceau ne faisait que donner le ton d'un album historique, où les cartouches de heavy metal s'enchaîne avec une vitesse et une fluidité folle. Le groupe a franchi un cap dans la créativité, proposant des morceaux racés et épiques qui ne s'essoufflent jamais. Ils se permettent même un sublime instrumental, « Insanity », composé par Andy LaRocque qui développe de douces mélodies soutenues par la guitare acoustique de Peter Blakk et la basse virevoltante de Hal Patino. La voix théâtrale de King Diamond reprendra bien vite le dessus pour s'adonner avec ardeur à ses envolées suraiguës, qui contribuent elles aussi à cette variété exemplaire. Cet opus atteint vraiment des sommets à plusieurs reprises, notamment son extraordinaire final avec son accélération démente, qui propulse à la face du monde un refrain d'une classe infinie :

« The Curse of « The Eye »... it will take you back in time! »

C'est tout à fait ça. Durant quarante-quatre minutes qui tutoient la perfection, The Eye de King Diamond me propulse dans le passé, me laissant observer par le trou de la serrure ses évènements tragiques. Avec sa touche particulière, ses airs de grande messe satanique et son tempo galopant, c'est un album complet qui confirmait l'étendue du talent des Danois. Il précédait aussi un hiatus de cinq ans qui allait donner l'opportunité à King Diamond de retrouver Mercyful Fate, mais aussi de consacrer un peu moins de temps et d'énergie à son groupe homonyme...

DONNEZ VOTRE AVIS

Vous devez être enregistré(e) et connecté(e) pour participer.

1 COMMENTAIRE(S)

Troll Traya citer
Troll Traya
30/10/2021 19:04
note: 8/10
J'avoue, depuis la chronique de Conspiracy, j'ai pris le temps de réécouter ce dernier et The Eye plusieurs fois. Mon avis est donc plus nuancé, et je suis désormais d'accord avec beaucoup de choses que présente dans cette Chro'.
Oui, The Eye est meilleur que dans mes souvenirs, presqu'aussi bon que Conspiracy, dans un genre un peu différent. Toutefois, il y à quand même un léger manque de... Vivacité, sur The Eye, et c'est sans doute pourquoi j'ai toujours considéré qu'il annonçait la débâcle The Spider Lullabye...

AJOUTER UN COMMENTAIRE

 
Vous devez être enregistré(e) et connecté(e) pour participer.
King Diamond
Heavy metal
1990 - Roadrunner Records
notes
Chroniqueur : 9/10
Lecteurs : (2)  8.5/10
Webzines : (3)  8.39/10

plus d'infos sur
King Diamond
King Diamond
Heavy metal - 1985 - Danemark
  

tracklist
01.   Eye of the Witch  (03:47)
02.   The Trial (Chambre Ardente)  (05:13)
03.   Burn  (03:43)
04.   Two Little Girls  (02:41)
05.   Into the Convent  (04:48)
06.   Father Picard  (03:20)
07.   Behind These Walls  (03:46)
08.   The Meetings  (04:31)
09.   Insanity  (03:01)
10.   1642 Imprisonment  (03:31)
11.   The Curse  (05:44)

Durée : 44:05

line up
parution
30 Octobre 1990

voir aussi
King Diamond
King Diamond
Abigail

1987 - Roadrunner Records
  
King Diamond
King Diamond
"Them"

1988 - Roadrunner Records
  
King Diamond
King Diamond
Fatal Portrait

1986 - Roadrunner Records
  
King Diamond
King Diamond
Conspiracy

1989 - Roadrunner Records
  

Essayez aussi
Animalize
Animalize
Tapes from the Crypt (EP)

2020 - Grumpy Mood Records
  
Traveler
Traveler
Traveler

2019 - Gates Of Hell Records
  
Traveler
Traveler
Termination Shock

2020 - Gates Of Hell Records
  
Screamer
Screamer
Hell Machine

2017 - High Roller Records
  
Iron Maiden
Iron Maiden
The Book Of Souls : Live Chapters (Live)

2017 - Sanctuary Records
  

My Own Private Alaska
Amen
Lire la chronique
Personal War
Personal War (EP)
Lire la chronique
Nine Inch Nails
Pretty Hate Machine
Lire la chronique
Mütterlein
Amidst the Flames, May Our ...
Lire la chronique
Fragments Of Unbecoming
Dawnbringer (Chapter VII - ...
Lire la chronique
Death Whore
Blood Washes Everything Away
Lire la chronique
Grind in Paris
Rectorragie + Serpillère +...
Lire le live report
Sulfuric Cautery
Subsequent Torture Sessions...
Lire la chronique
Reject the Sickness
Signs of the End
Lire la chronique
Golem Of Gore
Ultimo Mondo Cane
Lire la chronique
LIXIVIAT FESTIVAL #3
Always Never Fun + Cannibal...
Lire le live report
La photo mystère du 1 Juillet 2025
Jouer à la Photo mystère
Cytotoxin
Biographyte
Lire la chronique
The Great Procession
To Another Sun
Lire la chronique
Mordred
Fool's Game
Lire la chronique
Abscess
Tormented
Lire la chronique
Anthropic / Consuming Misery / Morgue Terror
Sickening Slabs of Brutalit...
Lire la chronique
Phrenelith
Ashen Womb
Lire la chronique
La photo mystère du 16 Juin 2025
Jouer à la Photo mystère
Execution
Camisole
Lire la chronique
Entretien avec Endless Agony
Lire le podcast
Scarset Rebellion
Flesh Against The Void
Lire la chronique
La photo mystère du 1 Juin 2025
Jouer à la Photo mystère
Sale Freux
Vol de travers
Lire la chronique
Today Is The Day
Today Is The Day
Lire la chronique
Prieuré
Jusqu'au bénitier
Lire la chronique
Urfaust
The Constellatory Practice
Lire la chronique
Morbific
Bloom Of The Abnormal Flesh
Lire la chronique
Tour 2025
Daria + The Jesus Lizard
Lire le live report
La photo mystère du 16 Mai 2025
Jouer à la Photo mystère
Bleed
Bleed
Lire la chronique