Je radote, je sais, pardon, mais qu’est-ce que le temps passe vite... Alors oui, être daron joue très probablement sur ce rapport au temps puisque pas une semaine ne se passe sans que je ne me le répète à moi-même face à ma progéniture qui n’a de cesse de grandir (en taille comme en maturité) mais ce n’est pas toujours la seule raison qui me pousse à me faire cette remarque. En effet, lorsque Norma Evangelium Diaboli et Teitanblood ont commencé à laisser courir l’idée qu’un nouvel album était en chemin (quelques nouveaux visuels et autres messages cryptiques dispensés consciencieusement sur les réseaux sociaux), je me suis naturellement replongé dans son prédécesseur, l’excellent
The Baneful Choir. Un disque redoutable et imposant, comme tous les autres d’ailleurs, sorti en octobre 2019 soit quelques semaines seulement avant le Covid et une crise sanitaire mondiale qui nous aura au moins permis une chose : gagner quelques jours de télétravail... Bref, le temps file et n’a évidemment que faire de nos protestations.
Un petit peu plus de cinq ans après sa dernière contribution, le groupe madrilène est donc aujourd’hui de retour avec la sortie le mois dernier d’un quatrième album intitulé
From The Visceral Abyss. Un disque exécuté comme son prédécesseur sous la forme d’un quatuor et qui, naturellement, n’est pas illustré par le regretté Timo Ketola mais par un autre artiste de choix puisque c’est en effet Dávid Glomba (Ascension, Cruciamentum, Cult Of Fire, Markgraf, Krolok, Phrenelith...) avec qui Teitanblood collabore depuis déjà quelques années qui signe l’illustration de ce nouvel album. Une œuvre dense, noire et imposante qui finalement ne tranche pas tant que ça avec les précédents travaux de sir Davthvs réalisés pour les Espagnols. Côté production, même si je ne peux pas vous le confirmer, je serais tout de même très étonné que Javier Félez Rodríguez qui gère (en partie ou intégralement) ces questions d’ordre techniques depuis 2009 ne soit plus de la partie alors qu’il a rejoint le groupe pour l’enregistrement de
The Baneful Choir et que le travail effectué ici sur
From The Visceral Abyss n’est pas bien différent de ce à quoi Teitanblood nous a habitués durant toutes ces années.
Bon, et donc, qu’en est-il de ce nouvel album ? Eh bien comme d’habitude, Teitanblood n’est toujours pas là pour amuser la galerie. Le groupe a beau tempérer momentanément ses ardeurs le temps d’une mise en route semblant vouloir reprendre là où la formation s’était arrêtée quelques années auparavant (les premières secondes électriques de "Enter The Hypogeum" ne sont pas sans évoquer en effet toutes les sonorités crépitantes entendues ici et là sur
The Baneful Choir), celui-ci va tout de même rapidement révéler son jeu en renouant avec ce Black / Death intense et intransigeant qui a fait sa réputation. Ainsi, en dépit de ses quarante premières secondes faisant preuve de retenue,
From The Visceral Abyss semble ne pas vouloir emprunter le même virage plus lourd et sournois de son prédécesseur mais plutôt renouer avec ces attaques frontales particulièrement soutenues et radicales qui ont fait notamment le force d’un album tel que
Death. Un constat que ne feront que confirmer les titres suivants même si Teitanblood n’est évidemment pas sans apporter un peu de nuances et de reliefs à son propos comme par exemple sur les premières secondes de "Sepulchral Carrion God", l’interlude canin "Sevenhundreddogsfromhell", "And Darkness Was All" entre 3:40 et 5:15 ou bien encore sur "Tomb Corpse Haruspex", tout d’abord lors de ces trois premières minutes particulièrement menaçantes puis à partir de 8:07 et ce jusqu’à l’issue de cet intense quart d’heure dont la conclusion va se faire au son de voix féminines en mode tragédie grecque rappelant celles déjà entendues sur "Charnel Above". De fait, si vous comptiez parmi les quelques échaudés ayant trouvé les digressions bruitistes et oppressantes de
The Baneful Choir peu à votre goût, vous devriez ici retrouver le sourire car
From The Visceral Abyss en est plutôt dénué préférant en effet mettre l’accent sur l’attaque à coups de séquences toujours aussi intenses et redoutables.
Si Teitanblood semble donc opérer ici un léger retour en arrière, ce quatrième album se distingue pourtant de ses prédécesseurs par une approche mélodique relativement nouvelle. Arrivé dans les rangs de la formation en 2019 afin de poser notamment sur
The Baneful Choir quelques leads tout aussi furieux et diaboliques que les compositions sur lesquelles on peut les trouver, Javi Bastard a choisi de varier son jeu et ainsi d’apporter ici quelques leads et autres solos moins intenses et plus mélodiques. Pas de quoi dénaturer l’intransigeance, la violence et la noirceur du propos de Teitanblood même si de "Enter The Hypogeum" à 1:34 à "Sepulchral Carrion God" à 2:11 en passant par "From The Visceral Abyss" à 3:26 et 6:11, "Strangling Visions" à 2:31, "And Darkness Was All" à 5:26 ou "Tomb Corpse Haruspex" à 6:57 il ne fait pourtant aucun doute que le guitariste espagnol a effectivement souhaité aborder les choses de manière parfois (pas tout le temps) moins chaotique et disons-le franchement plus subtile. Un exercice qui sur le papier peut paraître surprenant mais qui à l’écoute de ce nouvel album fonctionne particulièrement bien et apporte surtout encore un petit peu plus de contraste à l’ensemble.
Mené le couteau entre les dents le plus clair du temps,
From The Visceral Abyss voit Teitanblood revenir aux "fondamentaux" sans pour autant se contenter de faire du sur place. En effet, si le groupe n’a pas souhaité réitérer certaines des choses expérimentées sur
The Baneful Choir (ces interludes bruitistes et suffocants, ces séquences beaucoup plus lourdes et lancinantes...), cela n’a pas empêché pour autant les Espagnols d’offrir à leurs auditeurs un semblant de nouveauté et de fraîcheur avec notamment une approche mélodique partiellement moins chaotique et infernale qu’auparavant. Malgré tout, même si ces passages contribuent effectivement à insuffler un peu d’air aux compositions de Teitanblood et au passage encore un petit peu plus de contrastes à l’ensemble, on ne peut pas dire pour autant que cela change profondément la formule du groupe madrilène qui avec ce quatrième album continue d’imposer le respect par la force et le caractère absolument implacable de ses compositions. Bref, vous l’aurez compris, Teitanblood poursuit son chemin en faisant attention une fois de plus à ne commettre aucun impair. Une rigueur dans l’excellence couronnée une fois encore de succès ici.
2 COMMENTAIRE(S)
10/04/2025 16:34
Baneful Choir fût le seul Teintanblood à m'avoir déçu, un peu trop mou en se voulant parfois plus ambiancé, alors que l'ambiance ils l'ont toujours eu.
Mais la c'est le grand retour, probablement l'album le plus accessible du groupe, une très bonne synthèse entre la formule habituelle du groupe : chaotique, violente et hystérique, en incorporant plus de mélodies sans perdre son inflexibilité (le solo sur Stranglings visions putain) et une prod moins étouffante, toute proportions gardées.
09/04/2025 12:08