Parce que Thrashocore aime divertir son lectorat, voici un nouveau concept : la chronique dont vous êtes le héros ! (pour toutes réclamations envers un chroniqueur qui épuise avec ses idées de merde, rendez-vous en 9).
Vous vous réveillez, hagard, au sein d’une cave immense. Le froid vous gèle les os. Cherchant à savoir où vous êtes et comment vous êtes arrivé là, vous regardez aux alentours. Non loin de vous, vous trouvez un sac avec une trousse de maquillage, une tente black & fresh, un stock de bières Kornøl ainsi que des allumettes. Vous vous dites que vous auriez pu tomber plus mal. Dégoupillant une bière avec vos dents, un UGH poussé par l’effort, vous prenez le sac et commencez votre expédition. Rapidement, deux chemins s’offrent à vous : celui de gauche paraît glacial mais en ligne droite, sûr d’amener à la sortie ; celui de droite est labyrinthique mais recèle de potentiels trésors. Vous choisissez le premier chemin, rendez-vous en 1. Vous décidez de prendre le second, allez en 2.
1 – On ne peut pas dire que c’est l’esprit d’aventure qui vous guide ! Traditionnel, aimant les choses bien faites, vous vous souvenez de l’époque où Darkthrone était un groupe solide, fier fer de lance du black metal. Il faut dire que ça caille et que ça file droit sur cette route, l’occasion de laisser l’esprit divaguer à la longue discographie de Fenriz et Nocturno Culto. Si vous vous pâmez devant des posters du premier portant un chat, allez en 10. Si, au contraire, vous préférez l’austérité du second, allez réfléchir à comment un homme anciennement proche de pyromanes peut être instituteur en 6.
2 – Vous aimez l’aventure, les expériences inédites, le plaisir de la recherche esthétique pour elle-même ! Vous devez être particulièrement pénible en discussion de soirée mais vous savez apprécier les différentes époques de la carrière de Darkthrone. Vous reconnaissez certains pics, du tutélaire
Transilvanian Hunger au crachat
Circle the Wagons. Vous appréciez même les nuances de certaines œuvres aux allures classiques comme
Old Star ou
The Cult Is Alive. Cependant, vous avez pu être désappointé par un album comme
Ravishing Grimness. Pour expliquer en quoi il vous déçoit, allez en 5. Si au contraire, vous en avez marre d’être un pinailleur pénible, appuyez sur ses bons côtés en 3.
3 – Bon, ok,
Ravishing Grimness est bien trop convenu pour vous plaire totalement. Cependant, son ambiance hivernale ainsi que la voix de Nocturno Culto – toujours aussi parfaite pour figurer les toundras enneigées s’étalant à perte de vue – vous convainquent. Et puis, il y a « The Claws of Time », ce pic au milieu du plat, où l’absence d’originalité se remplace par une sensibilité à toute épreuve. Il y a de la beauté même dans le commun, à nous de chercher la lumière dans les instants quotidiens qui figurent un ailleurs bienheureux où tout n’est que… Vous vous perdez en mauvaise poésie et dérivez dans le labyrinthe, allez en 7.
4 – Qu’est ce que vous foutez là ? Vous ne suivez pas les numéros ? Il n’y a pas de 4 bande de flemmards !
5 – Franchement, les gens n’en ont pas marre d’écouter quinze fois le même disque avec une pochette différente ?
Ravishing Grimness nous a même fait le coup seul avec sa réédition contenant un artwork différent signé Costin Alexandru Chioreanu – beau, mais on n’est pas là pour donner des bons points. Non, là, vous vous sentez fatigué d’entendre les gens critiquer Darkthrone pour ses changements musicaux, surtout quand on voit le statisme qu’il a pu avoir à une époque. Toujours la même chose, malgré un rythme général moins rapide que certaines créations antérieures et quelques trouvailles bien seules dans ce déjà-entendu. Après avoir assouvi votre haine snob pour ce disque, allez en page 7.
6 – Ah Nocturno, l’homme mesuré qui tempère les ardeurs de l’autre survolté, toujours là quand il faut ! Vous avez toujours pensé qu’il était l’âme de Darkthrone et vous avez raison : il a après tout géré le projet dans sa majorité un temps où Fenriz n’avait pas la forme. Par exemple concernant
Ravishing Grimness, album injustement passé sous silence et dont vous sifflez l’air de « The Claws of Time » rien qu’en y repensant. Pour vous épanchez sur la qualité de ce disque auprès de la poussière, élevez la voix en 8.
7 – Vous voilà partagé entre détestation pour ce disque et adoration pour certains de ses titres. En bataille d’arguments avec vous-même, vous commencez à vous mettre des coups de poings au visage. Votre logorrhée sur l’état de l’art en général et du black metal en particulier ne devient qu’un gargouillis de sang qui finit par s’écrouler dans des méandres sans fin. Des fois, un disque peut être plaisant sans être exceptionnel. Vous vous en rendez compte malheureusement trop tard.
Vous allez sans doute mourir dans cette cave. Tant pis, en bon snobinard, votre dernière pensée sera de mettre une note à
Ravishing Grimness. « Siiiiiiiiiiiix suuuuuur Diiiiiiiiiiiix » entend-on alors crier dans les tréfonds, seul vestige de votre intellect surpuissant.
8 – Six titres, six brûlots et six qui nous donnent 666 ! Vous avez appris à aimer la période dite « creuse » de Darkthrone, celle injustement décriée par ceux qui n’ont écouté que deux fois les premiers albums et une demi-fois les suivants.
Ravishing Grimness ne marque pas l’histoire ; il la perpétue avec un savoir-faire qui reste aujourd’hui mainte fois copié, peut-être égalé voire surpassé, mais qui rappelle qui est le poussin et qui est le coq. Ici, ça braille au retour de la nuit dès le petit matin avec « Lifeless » sans jamais faiblir ! Une production un poil plus lisse mais toujours diablement lo-fi et brute en seule nouveauté, vous hurlez en écho votre amour pour un morceau au démarrage fulgurant comme « Across the Vacuum ». Enfin, quelques sorties de routes gardant en tête le codex du black metal – la beauté hivernale de « The Claws of Time » et le feu punk de « To the Death (Under the King) » – donnent suffisamment de variété à un album qui, s’il ne dépasse jamais les bornes du genre, apporte le plaisir vrai du vrai Darkthrone.
Vous décidez que cette cave est finalement à votre goût et prenez la décision d’y vivre. Vous plantez votre tente Quechua, sortez des crayons noirs et de la poudre blanche pour votre visage de votre inventaire. Bourré, peinturluré, vous gueulez les paroles écrites par Aldrahn de « The Beast ». On pourrait se foutre de votre gueule. Mais vous vous en battez les reins : vous êtes trop pur et trop froid, d’abord (et toc). Mettez 8/10 à
Ravishing Grimness.
9 - Allez-vous faire enculer. (Krow,
F.O.A.D., 2007)
10 – Ah Fenriz ! Que cet homme est caricatural à devenir à lui seul l’essence du metal ! Décidément, les riffs de ce facteur passent comme une lettre à la poste (vous décidez de vous calmer sur les blagues et la bière – prenez un Aspégic dans votre inventaire). Dommage qu’il soit si peu présent sur
Ravishing Grimness, s’occupant uniquement des paroles et de la batterie la majeure partie du temps. Certes, monsieur connaissait alors un épuisement artistique, laissant à son collègue le soin de maintenir Darkthrone à flot. Compréhensible, surtout qu’il signe un des meilleurs morceaux de l’album avec « The Beast », titre Celtic Frostien renvoyant à l’époque
Panzerfaust. Une pause bien méritée mais qui n’entame pas la qualité générale de l’album. Pour donner votre avis aux pierres et montrer l’étendue de votre amour pour la formation au lichen bordant les murs, allez en 8.
Artwork de la réédition par Peaceville Records
3 COMMENTAIRE(S)
03/05/2025 17:40
03/05/2025 09:45
03/05/2025 09:02