Nous avions laissé
PRIEURÉ sur
« Le départ », album unanimement reconnu comme l’une des belles sorties de
black metal français de 2023, mais
Sans-Visage, l’homme derrière le groupe, n’en a pas encore fini avec nous. Toujours fasciné par l’histoire, notamment celle du monde celtique, il revient nous conter à travers neuf compositions une odyssée du haut Moyen Age, le voyage de moines irlandais à travers l’océan. Bon, je pourrais faire un long paragraphe afin de vous résumer la vie de Saint Bredan, né vers 484, mais si vous n’en avez rien à secouer, je risque de vous ennuyer et si vous êtes passionnés d’histoire, vous trouverez certainement mon introduction trop partielle. Autant que vous alliez acheter « Le merveilleux voyage de saint Brandan à la recherche du Paradis » et restons-en là pour les aspects historiques. Nous, c’est de
black que l’on souhaite causer hein ? Et du sale si c’est possible.
Depuis ses débuts, la formation a sa patte. Trois EP, deux splits et deux LP ont contribué à affiner son identité régionale, une expression musicale crue qui naît et grandit dans un terroir riche de son passé, on entend la fierté des origines ainsi que le respect des traditions dans chaque note de «
Jusqu’au bénitier ». Pour autant, cette intégration au patrimoine n’en réduit pas le cercle d’intérêt. Chacun sera à même d’apprécier ce
metal noir armoricain, même si la langue française pourra toujours s’avérer un obstacle à la compréhension pour les auditeurs étrangers et donc à la pleine immersion dans le récit, la narration introductive de « Marécages » par exemple.
À l’image d’un périple, l’album semble construit selon la logique du voyage, alternant les instants de repos ou de contemplation (« Introït » ; « Foi » ; « Marécages » ; « Patience ») avec la lutte, parfois le combat contre soi-même pour continuer d’avancer, ne pas faire machine arrière, poursuivre la quête que l’on s’est fixée. Et quel que soit le registre, atmosphérique ou frondeur (l’énergie vitale de ce
black metal flirte souvent avec le
punk des basses-fosses), le style est là, puissant comme le fumet d’une étable où l’on chercherait refuge après une trop longue marche, parfois un peu effrayant également car, oui,
PRIEURÉ est un groupe que je trouve possiblement effrayant lorsqu’il exerce sa vindicte.
Peut-être que par rapport au précédent LP, nous pourrions trouver une certaine simplification des riffs (« Vautour » ; « Le grand incendie ») mais cela va pourtant de pair avec un renforcement de la violence, « Le grand incendie » étant peut-être ce qu’a écrit le groupe de plus radical, ainsi qu’une légère réduction de la durée moyenne des compositions, comme pour mieux aller à l’essentiel. De même, je ne retrouve que peu dans «
Jusqu’au bénitier » le souffle épique qui parcourait «
Le départ » au profit d’une dimension davantage
black punk que le traitement des vocaux de
Sans-Visage, plus instinctifs que travaillés et très criards, renforce. Également, la multiplication des intermèdes est à double-tranchant car, en dépit de leur qualité et du rôle prépondérant qu’ils jouent dans l’album, d’aucuns pourraient déplorer qu’ils soient trop nombreux et prennent donc trop de place par rapport au contenu extrême, réduit à cinq morceaux. Sauf que ces cinq morceaux se hissent sur le haut du panier du
black metal hexagonal, dans un style légèrement différent que par le passé, même si « Le triomphe » renoue avec l’inspiration épique d’antan, le tout faisant de ce LP une sortie aussi réussie qu’instructive.
Il faudrait encore noter l’apport indéniable des quelques invités : le chant terrible de
Torve dans « À travers la forêt », les narrations inspirées de
Quentin Foureau (« Marécages ») ou encore la cornemuse de
Geoffroy D.A. tout au long de « Triomphe », tout cela s’inscrit dans la logique du chemin qu’arpente
PRIEURÉ depuis 2021, un voyage initiatique exigeant, cependant pédagogique, l’occasion de se réapproprier son passé et d’en faire une source de fierté.
Si les premières écoutes m’ont moins immédiatement convaincu que «
Le départ », c’est sans doute parce que le venin est à diffusion lente et que, paradoxalement, la frugalité des titres n’est qu’apparente. Une fois que l’on s’est habitué à marcher pieds nus sur les cailloux tranchants du sentier, nous découvrons des aspérités, des renfoncements, des zones d’ombre, une flaque pour désaltérer les gorges asséchées par la poussière du voyage. Pour ceux qui souhaiteraient poursuivre l’expérience, n’oubliez pas que le 5 décembre à la Péniche Antipode
PRIEURÉ jouera aux côtés d’
ARKAIST et de
FORMORAICH.
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