Pour marcher sur les traces d’un
Keyser peu convaincu par l’intérêt de la musique proposée par
CYTOTOXIN, nous allons nous intéresser à «
Biographyte », cinquième LP du quintette allemand. Peu de mouvements au niveau du personnel, le batteur
Maximilan Panzer (
DYING EMPIRE,
LED ASTRAY) remplace l’excellent
Stephan Stockburger, difficile d’affirmer que cela ait eu un quelconque impact sur ces onze nouvelles compositions, dont la durée ne cesse de croître au fil des albums puisque celui-ci culmine à un peu plus de quarante-sept minutes… Lorsqu’il s’agit de
brutal death metal technique, une telle longueur file parfois des indigestions, à voir donc de quoi il retourne ici.
Du côté du concept, aucune évolution notable : les mecs restent bien entendu fascinés par le nucléaire, petite particularité thématique que j’ai toujours trouvée sympathique, notamment sur un plan esthétique. La pochette va dans le sens de cette démesure qu’a toujours cultivé le groupe, le gigantisme du personnage rend bien et c’est somme toute une chouette illustration pour nous refaire plonger dans un bain de radiations. Quant à la musique, sans surprise, si vous biberonnez du
ORIGIN, du
WORMED ou du
ARCHSPIRE en toutes circonstances, cette sortie me semble difficilement contournable. Quant aux amateurs de sonorités à l’ancienne, poursuivez votre route sans regret.
Matraquage permanent, technique de dingue, quelques ponts plus mélodiques histoire de respirer, de nombreux plans issus de la scène
deathcore également (« Hope Terminator », « Behind Armored Doors » pour ne nommer qu’eux), les critiques qui avaient été formulées en ces pages à l’époque de
« Radiophobia » puis de
« GAMMAGEDDON » restent totalement exactes, je cite : «
D'un côté des parties brutal death technique sweepées impressionnantes. De l'autre, des mosh parts et autres saccades faciles sans intérêt typiques du deathcore moderne que je ne goûte guère ». Inutile d’attendre bien longtemps pour confirmer ce constat explicite : « Hope Terminator », le titre d’ouverture, en est l’image exacte : des passages complètement fous couplés à des gros breaks lourdauds. Alors oui, « The Everslave » tétanise l’auditeur dès les premières mesures, les
blasts sont ahurissants, le débit vocal est monstrueux dans l’intensité de sa scansion, les guitaristes
shredent à mort, ça fout clairement le vertige même si l’on n’échappe hélas pas à l’intégralité des poncifs
slam deathcore, tant au niveau des gargouillements vocaux que des breaks non recommandés par les ostéopathes. Cela dit, comme ils sont intelligemment amenés, j’y prends un certain plaisir d’autant qu’ils sont utilisés avec parcimonie.
Par conséquent,
CYTOTOXIN demeure une formation clivante. Elle a pour elle une production aussi robuste qu’un abris anti atomique, d’une propreté aveuglante, la force de frappe chirurgicale de l’élite, évidemment une technicité largement au-dessus de la moyenne et les types réussissent par je ne sais quel miracle à injecter des tonnes de
groove, de
swing, dans leurs compositions. Mais… Mais quoi en fait ? Certes, vers le huitième titre, je commence à saturer tellement tout est ultra dense mais cela n’est sans doute imputable qu’à ma faible capacitée d’absorption, d’autres arriveront au bout en en redemandant, personnellement je ne vois pas la fin de « Bulloverdozed ». Heureusement que la conclusion du LP nous ménage un peu avec une chanson brève (« Transition of the Staring Dead ») puis un interlude (« Revelation ») que je qualifierais d’inutile et qui ne fait finalement qu’introduire les six minutes de « From Bitter Rivers », le plus long morceau de la carrière des Allemands, certainement pas le meilleur même s’il s’efforce de présenter une facette davantage pesante et « ambiancée » de ce
Tchernobyl death metal.
«
Biographyte » nécessite de nombreuses écoutes, attentives, c’est une évidence tant il est riche, varié également (le nombre de techniques de riffs est hallucinant), avec en prime un chant qui a la bonté de ne jamais se fourvoyer dans le criard insupportable. Je dirais également que les sept premiers titres m’ont tout simplement atomisé la cervelle, finissant néanmoins par décrocher car il me manque de l’émotion, une fois passé le choc frontal. En définitive, s’il fallait noter cette performance uniquement sur sa technique, on pourrait établir une comparaison avec les gymnastes russes des années 80 : des monstres surentraînés, peut-être aussi légèrement dopés. Tout est parfait, jamais informe, toujours difforme, les musiciens repoussant encore et encore les limites du jouable, sur le mince fil de la perte absolue de sens. Le pendant négatif de cela, c’est l’inhumanité qui en découle, inhumanité certainement voulue mais qui, pour ma part, induit une espérance de vie trop réduite.
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30/06/2025 10:02
29/06/2025 17:46