Vous commencez à le savoir, à force de radoter : je suis un paresseux patenté qui n'aime pas les festivals. Socialement dysfonctionnel, acheter des disques en mailorder pour les savourer chez moi, seul (difficile de trouver quelqu'un avec qui faire de grands moulinets sur du Sulfuric Cautery, hein...) me convient parfaitement. Pour autant, une fois par an, se tient un rendez-vous qui s'impose désormais comme un incontournable pour bibi - le Lixiviat Festival. Du nom du label lyonnais qui en tient les rênes (avec un accent circonflexe, pas une selle). Difficile de ne pas me prendre le cul par les anses quand les astres sont à ce point tirés au cordeau : un festival dédié exclusivement au Grindcore et ses cousins dégénérés, aux affiches toujours plus affûtées, à moins de deux heures de la chaîne des Puys... Franchement, on a connu pire torture.
Surtout après les branlées que furent les deux premières éditions. Un peu de name-dropping indigeste, pour les cancres du fond qui n'ont pas suivi ? Chiens, Whoresnation, Ona Snop, Shitbrains, P.L.F. (!!!!), Rotten Sound, Horesbastard, Feastem... Les sachants continuent de sacher, les autres ne savent pas ce qu'ils loupent, je n'étais certainement pas le seul à attendre la confirmation d'une troisième édition. Et pour cette cuvée 2025, Nik, Mak et Ugo continuent de régaler leurs ouailles avec une affiche extraordinaire, entre découvertes en puissance et grosses, grosses attentes pour votre serviteur : Gadget (!!!) et Organ Dealer (!!!!!!) en France, Failure, Endless Swarm, ANF... de l'Italie à l'Écosse, petit détour par les États-Unis, la Malaisie (!), la Suède et la Norvège, vraiment, et pour une fois, la bonne moitié des groupes de l'affiche m'étaient totalement inconnus.
Ni une, ni deux, mon acolyte tatoueur Axel* dans le coffre de la Dacia, c'est le coeur léger, la banane aux lèvres malgré un soleil de plomb et un périphérique lyonnais toujours aussi abominable que je prends la direction de Vaulx-en-Velin, dalle de béton à ciel ouvert, pour savourer ce qui s'annonçait déjà comme une édition exceptionnelle. Et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle n'a déçu aucun de nous, pas plus que le reste du public, au moins aussi nombreux que les deux années précédentes. Le temps de savourer un peu la climatisation de l'hôtel que nous prenons la direction de Grrrrnd Zero (vous ne m'en voudrez pas si j'oublie ou ajoute un R) pour déguster - dans tous les sens du terme.
FUMIST (France)
Je crois qu'Ugo est abonné aux ouvertures du Lixiviat ! Il était déjà derrière les fûts pour
Civilian Thrower et
Ran, ouvrant respectivement la première et la seconde édition du festival. Rebelote, donc, mais avec
Fumist, cette fois-ci, auteur du très bon
"Coaltar", sorti chez Lixiviat l'année dernière - et chroniqué dans nos colonnes. Joyeux pot-pourri de Grindcore, de PV, de Punk Hardcore, le groupe, composé de membres de
LA HESS, porte très mal son nom. C'est avec hargne et sérieux que le quatuor va péter les chevilles de l'auditoire et nous mettre dans le bain - ou le sauna, plutôt, les températures se feront de plus en plus infernales au fil des prestations. "S'aérer dans la cave", "A312", "Second Couteau" au rythme plus lent et écrasant... Un set aussi chouette que varié qui fera gentiment hocher la tête en sifflant sa première bière, et une excellente entrée en matière pour la suite des hostilités !
MORBIER DANGER (France / Suisse)
Nouveau loupé pour
LMDA, qui ont décidément la guigne... Censé jouer cette année après avoir annulé en 2024 (
no offense, les gars, mais ça nous a permis d'avoir
P.L.F. à la place), leur batteur s'est malheureusement pété la cheville deux jours avant cette édition. Trouver un remplaçant au pied levé n'est pas toujours évident. C'est donc
Morbier Danger qui assurera le créneau. Je vous laisse un moment pour apprécier le nom, reflet du concept : Grindcore de maître-affineur. Et si des "Cantal Goya", "Saint-Morray", "Chaussettes aux Moines" ou "La Tour de Babibel" peuvent faire peur, laissant supposer un
n-ième groupe de merde construit sur un gimmick (coucou
Gutalax), musicalement, il n'en est rien. Redoutable Grindcore tirant dangereusement sur le Mincecore à la
Agathocles et tous ses rejetons, concentré de tout le savoir-faire de ses deux membres : Léo (
Grotesquerie, Kakothanasy, Dry and Shattered) à la guitare et au chant, et Thomas (
Proudhon) à la batterie et au chant. Quinze petites minutes que j'attendais avec curiosité, connaissant la puissance de feu des deux bougs. Et une vraie leçon ! Thomas AVOINE proprement son kit (pauvre caisse claire...) tout en assurant le chant comme un chef, Léo le secondant dans des riffs surpuissants, jamais simplets. C'est bien composé, c'est bien interprété, ça donne envie de tout casser, et surtout, ça
tupa-tupa juste ce qu'il faut pour passer un excellent moment. Le petit bonus ? Dégustation de Morbier à la table de
merch. Plaisir d'offrir. Je vous invite en tout cas chaudement à écouter
"Briescard Destin" pour vous faire une idée de l'ambiance.
ALWAYS NEVER FUN (Italie)
Détour par l'Italie pour les deux formations qui succèderont à
Morbier Danger ! C'est
Always Never Fun, groupe de Powerviolence/Fastcore de Palerme qui reprend les planches, dispensant une prestation pour le moins furieuse. Publicité mensongère pour l'accroche au dos de leur merch (superbe t-shirt rose qui fera son petit effet) en société,
"Maximum Relax", puisque le quatuor va faire fondre GZ et botter des culs à la chaîne. Je me contentais de suivre leurs aventures de très loin, de leur split avec
Powerxchuck,
ill! et plus récemment
avec les regrettés Turtle Rage. Aux rythmiques typiquement Punk qui appellent le déhanché se succèdent des passages blastés pied au plancher du plus bel effet, sur un chant éraillé qui donne envie de beugler en chœur. L'exécution de l'ensemble est juste ce qu'il faut
sloppy pour lui conférer ce côté "à l'arrache" qui me séduit particulièrement dans le genre. Bref, les murs commencent à suinter, pas fâché d'aller reprendre l'air en attendant
Failure !
FAILURE (Italie)
Et là, je peux dire que c'était ma première GROSSE attente du festival ! Trio Italien que je suis depuis
leur album éponyme de 2017, j'étais très curieux de voir comment ils allaient réussir à transposer leur incroyable énergie et leurs parties
stop'n'go hallucinantes sur scène.
Failure, c'est vraiment la crème de la crème du Fastcore. Tout ce que j'aime chez un groupe comme
Ona Snop (avec qui ils ont justement partagé un split en 2019), mais avec un pied encore solidement fiché dans le Punk. Le public, relativement timide jusqu'à présent (et vu la chaleur, on ne pourra pas leur en vouloir), va commencer à devenir complètement con, moi le premier. Les Italiens sont visiblement très, très contents d'être là, et ça se sent ! Le guitariste va enchaîner les riffs à roulettes avec un large sourire fiché en travers de la trogne, gigotant, se jetant dans tous les sens, pendant que le chanteur débite ses glapissements sans aucun frein - et que le batteur fou tabasse. Franchement, dire que c'était carré est un euphémisme. Un titre casse-gueule comme "Drift Towards Contagion" semble être une promenade de santé pour le trio. Vingt petites minutes pendant lesquelles le groupe aura eu le temps de jouer la quasi-intégralité de son répertoire (enfin, j'imagine, vu qu'ils sont systématiquement en dessous de la minute), distribuant les beignes avec une bonne humeur franchement communicative. Génial, bouillant, t-shirt trempé et cerveau réduit en purée : on va prendre l'air avant le prochain set.
ENDLESS SWARM (Écosse)
Oui, c'est la deuxième grosse attente du festival pour bibi : les Écossais d'
Endless Swarm,
"le groupe qui te fait faire des maths quand tu l'écoutes", dixit Raph de
Blockheads. Pas mieux. De la même manière que pour
Failure, j'étais extrêmement curieux de voir comment les constructions alambiquées, menées pied-au-plancher, d'un
"Manifested Forms" allaient être retranscrites sur les planches de GZ. Pari remporté haut-la-main par le quatuor d'Edimbourg. Graham Caldwell, tatoué de la tête aux pieds, va jouer son rôle de chef-d'orchestre à la perfection, avec son timbre de voix reconnaissable entre mille autres - et qui en rebute plus d'un, je vous vois ! Alex Sharp,
birthday boy du jour et affublé d'un t-shirt
tie'n'dye du plus bel effet, complémente à merveille le chanteur, dans ce jeu de question/réponse typiquement PV, sur lequel viennent se greffer les riffs Punk enrichi au plutonium de Mathew Burton-Webster. Je sais que je le répète souvent, mais tant de technique et de maîtrise de ses instruments mis au service d'un genre aussi difficile à écouter, ça me scie. Quel bonheur de pouvoir vivre l'hymne "Split Brain" sur scène ! D'autant que le quatuor nous aura également donné un avant-goût particulièrement savoureux de son prochain album,
"The Body Hammer", prévu pour l'Automne chez Jungle Noise... Bref, superbe prestation et son aux oignons, la température est encore montée d'un cran !
THE ARSON PROJECT (Suède)
Un hammam à 45°C, plongé dans la pénombre ? Cadre idéal pour découvrir
The Arson Project IRL - loin de leur milieu naturel, pourtant. Initialement prévus à l'affiche de l'année dernière, mais contraints d'annuler, cette fois-ci, c'est la bonne. Ceux qui ont ramassé la mandale
"God Bless" en pleine tronche comprendront sans problème où je veux en venir. Infernal. Suffocant. Un trente-trois tonnes qui te passe dessus, puis refait marche arrière, juste au cas-où. J'avoue ne pas être très au fait du
line-up du groupe, mais j'ai été assez surpris de voir successivement, derrière la guitare, Nik (
Warfuck) et Lopin (
Whoresnation) - ainsi qu'un autre boug que je n'ai pas identifié, étant peu physionomiste (et aveuglé par la sueur). En un mot comme en cent : dantesque. Tout le monde a mouillé le maillot, groupe comme public. Les saillies de voix éraillées sur cette batterie marteau-pilon, moi, ça fait fondre mon petit cœur. De "For the Worms to Feed" jusqu'au fantastique "Tai-Atari" (aptement nommé, vu la prestation),
The Arson Project donne tort aux esprits chagrin qui considèrent le Grindcore suédois comme trop bien coiffé, trop propret pour être honnête. Dommage que le micro de Pibe (
Whoresnation aussi) décide de ne pas fonctionner pour sa petite apparition sur scène - oui, c'est bien la seule chose que j'aurais à reprocher au Suédois pour ce soir, c'est vous dire à quel point c'était chouette.
Navré pour Mental Hygiene Terrorism Orchestra, mais la chaleur écrasante et la fatigue accumulée auront eu raison de ma motivation. Leur Noisecore à saxophone me laissant complètement de marbre sur album, nous avons préféré prendre l'air sur le trajet retour à l'hôtel - tout en remerciant intérieurement l'inventeur de la climatisation. Bref, une première journée qui aura été à la hauteur de ses promesses, clairement. Et ce n'est que le début !
Après une courte nuit de sommeil - et avoir honteusement larvé toute la journée sous la climatisation de la piaule d'hôtel; mangé, comme le veut la coutume chaque année, au Subway du Carré de Soie, nous prenons la direction de GZ pour cette dernière journée de festival. Journée découverte s'il en est, puisque je ne connaissais pas la moitié des groupes qui se partageraient la scène ce soir là ! Pas de grosse crainte, cependant : l'on sait que les gens du Lixiviat crew sont toujours de bon goût.
LILIxELBE (République Tchèque)
Petit changement dans l'ordre de passage,
Cannibal Ferox étant arrivé un poil à la bourre. C'est donc à
LilixElbe qu'incombe la tâche d'ouvrir les hostilités pour ce deuxième jour ! Empruntant son nom à la peintre danoise, première femme trans répertoriée dans l'histoire, pour le
trivia. Initialement un trio jusqu'à ce que le bassiste ne quitte le navire, le
power duo tchèque officie dans de la Powerviolence tout ce qu'il y a de plus orthodoxe, bourrée ras-la-tronche de
stop'n'go, pour notre plus grand plaisir. Quelle découverte, et quelle branlée ! On s'arrête, on repart, on perd complètement la boule dans les breaks casse-gueule autour desquels sont construites les compositions, le tout avec un petit
twist un peu sombre, un peu grave, qui fait toute la différence. Pas besoin d'être quinze pour casser des bouches, et
LilixElbe en est, encore une fois, la preuve. Superbe mise en bouche pour la soirée. Peu de sorties au compteur pour la formation, mais l'on recommandera
leur split avec les Allemands de Trigger pour un aperçu de leur puissance de feu.
CANNIBAL FEROX (Espagne)
J'avoue ne pas être très client du groupe,
"Rituales de Transmutación", sorti l'année dernière, m'en ayant touché une sans faire bouger l'autre. J'y allais donc sans trop y croire, juste pour siffler ma bière tranquillement, la chaleur à l'extérieur étant étouffante. Grosse, grosse surprise pour ma pomme !
Machetazo rencontre
General Surgery pour du Death/Grind d'excellente facture, lorgnant allégrement sur le Gore. L'on retrouve les poncifs du genre, passages mid-tempo prononcés et blast-beats complètement DÉBILES au niveau de la vitesse (grosse, grosse performance du batteur), riffs lourds et gras sur un chant caverneux au possible... L'impression d'être à la maison, en charentaises. Alors non, rien d'original, rien de transcendant, mais les Ibères savent jouer et surtout, tout écraser. Peut-être un poil répétitif, les ficelles étant épaisses, mais je n'ai pas boudé mon plaisir, régressant à l'état d’australopithèque à moultes reprises. Comme quoi, entre le studio et la scène, il y a vraiment un monde... Et ça y est, ça commence vraiment à sentir le renard à l'intérieur, il est temps d'aller prendre l'air.
GROTESQUERIE (Suisse)
Direction la Suisse, mais toujours dans le Death/Grind à tendance Gore avec
Grotesquerie. Deux têtes connues au line-up et habituées du Lixiviat Festival, puisqu'on y retrouve Lionel (
Kakothanasy et Exorbitant Prices Must Diminish) et Leo (
Kakothanasy et
Morbier Danger), accompagnés d'un certain Alex (
Coffin Birth) aux fûts. Si
Morbier Danger articule son concept autour du fromage,
Grotesquerie se concentre sur le cannabis - du moins sur leur première sortie,
"Composted Beyond Recognition'. Pas une claque, ni une purge, mais j'avoue être resté de marbre devant leur set. Pourtant, musicalement, ça bombarde - et les trois garçons sont tous monstrueux de technique. Contrairement à la curiosité
Kakothanasy, devant laquelle j'étais resté scotché l'année dernière (en pâmoison devant le jeu de batterie de Florent Duployer, surtout), j'ai eu un peu de peine à rentrer dans leur set, que j'ai trouvé assez statique. Huez moi, mais nous en avons profité pour aller dévaliser le merch et prendre l'air. Sans rancune, les gars, et promis, ça ne m'empêchera pas d'écouter
"Uninhabited Plane", qui sort la semaine prochaine.
HIGGS BOSON (Norvège)
Est-ce la fatigue ou la chaleur qui nous auront fait quitter la salle après dix minutes de
Higgs Boson ? Probablement un peu des deux - et également l'envie de garder des forces pour l'incroyable triplette de clôture du festival. Je ne connaissais le groupe ni d'Eve, ni d'Adam, et je confesse avoir eu un peu de mal à rentrer dedans. Trop le cul entre deux chaises pour réellement me convaincre (
"Trve Skate Cult", paru en 2023, en est symptomatique), accélérations pas suffisamment véloces, parties plus typées Punk pas forcément hyper marquées... C'était pas vilain, mais vu le niveau des groupes jusqu'alors, la moindre baisse de régime peut faire tâche d'huile. Bref, après dix minutes, retour dehors pour reprendre des forces.
TERMINATOR X (République Tchèque)
Beaucoup plus véloce et convaincant, les Tchèques de
Terminator X auront fait le boulot sans trop de problème. Arrivés dans la salle à la bourre à cause de la queue au bar (oui, il a vraiment fait
très chaud, encore pire qu'en 2023), nous avons quand même pris une petite tartine de phalanges. C'est rapide, précis, ça breake au scalpel, et la foule l'a bien senti : ça commence à s'agiter frénétiquement. En tout cas, ça m'a donné envie de réécouter
"Paradigma", leur 10'' de 2021 - je vous invite à faire de même, un peu de Powerviolence n'étant jamais une mauvaise idée.
TOOLS OF THE TRADE (Malaisie)
Et voilà
LA grosse découverte du festival, pour moi en tout cas ! Inconnu au bataillon avant ce week-end, alors que le groupe existe depuis bientôt 20 ans ! Grosse fessée, administrée en bonne et due forme par les Malaisiens, visiblement très heureux d'être là - et très heureux de voir le public être aussi réceptif à leur Grindcore, savoureux mélange du côté
street, Punk croûteux d'un
Magrudergrind et la force de frappe nucléaire d'un
Rotten Sound. Les riffs portent le sceau Husqvarna, ça blaste à des vitesses qui ont fait imploser les radars du périmètre, quand la course ralentit, c'est pour mieux
D-beater (pas mal, celle là, non ?) et faire augmenter la température. Vingt petites minutes éprouvantes mais Ô combien plaisantes pour qui goûte son Grindcore quand il ne cherche pas à réinventer le fil à couper le beurre, mais sait se contenter d'être efficace ! La queue était longue à leur table de
merch après leur prestation, et c'était largement mérité. Leur dernière sortie en date,
un split avec les Indonésiens d'Extreme Decay, donne un bon aperçu du potentiel du combo.
ORGAN DEALER (États-Unis)
Grosse attente du festival,
"The Weight of Being" ayant bien squatté ma platine en 2023. Ceux qui savent, savent, j'étais impatient de prendre une double dose de riffs assassins sur lit de batterie qui galope. J'avoue ne pas avoir trop suivi l'actualité du groupe, mais il semblerait qu'ils aient perdu Scott Moriarty derrière le micro... Qu'à cela ne tienne, c'est une surprise de taille que l'on va retrouver au chant ce soir : Mitchell Luna, venu spécialement pour l'occasion, rien que ça. L'on connaissait le bonhomme pour ses prestations effrayantes chez
Maruta,
Noisear et plus récemment
Shock Withdrawal (je vous conseille chaudement l'écoute de
"The Dismal Advance")... Ouais, encore une fois, les astres s'alignent, ça va être bien... Et ça l'était, clairement. Quelle énergie ! Malgré le milliard de degrés atteint dans la salle (la faute à l'affluence pour une rareté pareille en France), le quatuor ne va pas s'économiser, faisant la part belle aux titres de leur dernier album (même ceux de quelques secondes, incroyable), le tout mené à toute-vitesse, bien entendu. Franchement, rien que pour "Solitude is Death", ça valait le coup. Quelle branlée. Merci pour ce moment, messieurs.
GADGET (Suède)
Autre rareté à l'affiche cette année, et avant-dernier groupe de la soirée, avec
Gadget, venu tout droit de Suède. Actif depuis 1997 et mené par William Blackmon (que l'on connaît pour son taf de
mix/master à l'
Overlook Studio), on en retient des albums extrêmement efficaces, de
"Remote" (2004) à
"The Great Destroyer", sorti il y a bientôt dix ans (que le temps passe !) et que j'avais pris en pleine poire, à l'époque. Changement de taille au micro, puisqu'Emil Englund a cédé sa place à Emilia Henriksson derrière le micro. Et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle tient LARGEMENT la baraque, malgré des soucis de micro pendant les premiers titres. Rien qui n'empêchera le combo de débiter du riff au kilomètre, l'ensemble mené tambour battant (c'est le cas de le dire) par une section rythmique proprement débile de vitesse et de précision - point commun à tous les groupes de l'hémisphère nord, il faut croire... Il fait chaud, très, très chaud, et le pit est en surchauffe. Replié de façon stratégique à l'arrière de la salle, relativement statique (bouche bée devant le déferlement de violence absurde, surtout), ça ne nous aura pas épargné la bonne cascade de sueur qui dégouline dans le dos. On en ressortira lessivés et fourbus, mais diablement heureux - surtout vu ce qui se prépare en fermeture de cette seconde et ultime soirée.
WAREXTERMINATION (France)
Cette troisième édition était excellente, mais si je ne devais en retenir que vingt minutes, ce seraient celles-ci, vraiment.
Je le sentais venir : lorsque Lixiviat a annoncé à l'affiche le mystérieux
Warextermination, avec pour seul indice son logo, j'ai eu un coup de pré-jus.
Insect Warfare. La confirmation est arrivée quelques jours à peine avant le festival : les membres de
Warfuck et
Whoresnation qui s'uniraient, le temps d'un court set, pour rendre hommage à l'album
"World Extermination" - qui souffle, cette année, ses dix-huit bougies. Unique
full-length des Texans, mais qui aura redéfini le Grindcore pour les vingt années qui suivirent (au moins). Ceux qui me lisent le savent, ses 22 minutes et 30 secondes font partie de mon top 5, tous genres confondus, en plus d'être l'un des albums de Grindcore les plus importants pour le style - content ou pas, ce sont les faits. Autant vous dire que je bouillonnais d'impatience,
Whoresnation et
Warfuck faisant partie des tauliers du Grindcore hexagonal.
On entre donc bien en avance dans la salle, épuisés mais fébriles, pour découvrir deux batteries : oui, Tonio et Mak vont jouer en même temps. EN MÊME TEMPS (et certainement pas pour se tripoter la nouille comme
Chepang). Fin des balances, le son va être excellent, Pibe a la gorge pleine de glaires... Le
sample de "Oxygen Corrosion" est lancé, et c'est parti pour vingt minutes de bonheur. Putain, quel pied ! Au-delà de voir six musiciens surpuissants et rompus à l'exercice de la scène, je crois que nous avons avant tout tous vu six potes se taper d'énormes barres, très heureux d'être là et de pouvoir faire du bruit ensemble, tout en rendant hommage à un disque absolument essentiel. C'était parfait - si seulement Dobber, Rahi et Beau avaient pu voir ça ! L'exécution était absolument impeccable. Très, très impressionnant de voir les deux batteurs s'accorder aux oignons, effrayants de précision (franchement, à part de minuscules décalages, c'était
tight à souhait), et quel plaisir immense de voir les riffs ultimes de "Self Termination", "Nuclear Deterrence", le mid-tempo écrasant d'un "Hydraphobia", les breaks brise-nuques de l'hymne "Manipulator" joués sur scène ! Très cool de voir Campos (
Convulsions, dont je recommande chaudement le premier album,
"Grindcore Not War') s'inviter sur scène et rejoindre Pibe au chant le temps d'un titre également !
C'était un point final absolument parfait. L'intégralité de la salle en est ressortie trempée, de la tête aux pieds. Le coup d'un soir parfait : sauvage, intense, inoubliable. Tant pis pour vous, il fallait être là.
Pour conclure ce report, qui commence à sacrément tirer en longueur, je vais me contenter de reprendre les mots d'Alessia, chanteuse d'Exorbitant Prices Must Diminish (allez écouter "For a Limited Time") et intervieweuse en chef des groupes cette année encore - car on ne pourrait pas mieux résumer mon ressenti du festival :
Citation : "Lors des interviews de cette année, un sujet est souvent revenu sur le tapis : le dévouement. Pas seulement le dévouement à la pratique de son instrument ou à la musique en général, mais le dévouement à la scène, aux salles et lieux de vie de la scène, à l'organisation de concerts et à la communauté. Le concert [de Warextermination] a été pour moi le point culminant de tout cela : la musique n'est pas seulement une question de son, c'est aussi un acte de résistance contre ce monde de merde et un acte de solidarité, elle crée des liens entre ceux qui refusent de se conformer, qui cherchent à vibrer différemment et plus encore."
Le dévouement ? La dévotion, ouais ! Des exemples ? Organ Dealer : 30 heures de voyage pour 20 minutes de chaos contrôlé. Tools of the Trade : la route depuis la Malaisie pour venir tout casser en Europe. Gadget, Higgs Boson, The Arson Project débarqués du froid suédo-norvégien pour jouer très vite et très fort par des températures infernales. Autant d'équations qui sembleraient absurdes au commun des mortels - mais la preuve de l'amour le plus inconditionnel qui soit pour notre genre préféré.
Le Lixiviat Festival, ce n'est pas seulement deux soirs de blast-beats et de pertes de points d'audition (et de QI, aussi) : c'est une bulle. Une vraie. Il suffit d’un détour par la cour de GZ entre deux sets pour voir des sourires partout, des retrouvailles, des accolades, des regards complices malgré la fatigue. Une vraie communauté, des profils parfois très différents qui se rassemblent autour d'une passion commune. On va pas se mentir, vu la merde brassée par l'actualité ces dernières semaines, ça fait quand même beaucoup de bien.
Alors merci. Merci aux groupes, au public, à Basement pour les hot-dogs végés, irréprochables chaque année. Et surtout : merci au crew Lixiviat, pour cette troisième édition, encore plus dingue que les précédentes. C’était intense, c’était salutaire, c’était nécessaire. Vous êtes foutus maintenant, il va falloir recommencer. C'était trop beau. Rassurez-vous : on sera là, toujours aussi nombreux.
3 COMMENTAIRE(S)
02/07/2025 18:35
02/07/2025 18:26
Et tu as tout dit sur l'ambiance, le Lixiviat c'est unique en son genre, j'ai fait les 2 premières éditions et clairement c'est un fest à taille humaine avec beaucoup de love qui dégouline, c'est trop bien. Gardez la foi les mecs parce qu'on en veut d'autres, des éditions!!
02/07/2025 14:38
Tes récits me donnent envie de faire un p'tit coup de TGV pour assister à ce fest, p-ê un jour ! Dans l'attente, si tu connais les orgas, n'hésite pas à leur soumettre l'idée d'un "Lixiviat à Paris" (comme l'ont fait LADLO et Frozen Records) !